Rivarol – les vœux pour 2021

Rivarol – les vœux pour 2021

Journal hebdomadaire Rivarol n°3453 du 6 Janvier 2021
Hebdomadaire de l’opposition nationale et européenne.
« Quand les peuples cessent d’estimer, ils cessent d’obéir » 

Éditorial : Nos vœux pour 2021 : Le déconfinement de nos libertés
Billet hebdomadaire : La fin de l’État de droit et la guerre contre le peuple

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Le système de corruption du Droit

Le coup d’État du Droit
III – Les effets inédits d’un système de corruption :
Le droit contre l’ordre, la justice et la sécurité,
Le droit contre le citoyen, et contre les peuples.

« La mort de Lincoln est une catastrophe. Je crains que les banquiers étrangers, avec leurs roueries et leurs expédients tortueux, ne prennent le contrôle de l’Amérique afin de corrompre la civilisation moderne. »

Le Chancelier Bismarck, à l’annonce de l’assassinat de Lincoln, cité par Luca Gallesi, « Il était une fois… l’économie », (PG de Roux, 2016).

L’appareil du droit contrôlé par l’argent de l’étranger au service de la corruption des lois et des mœurs est partout dans l’Union européenne, il se mêle de tout, il s’insinue partout, dans un effort condamné d’avance pour remplacer les relations humaines par le contrat, la règle, ou le marché. Comme si le droit remplaçait les biens communs, le savoir-vivre et créait la confiance !

La fonction première de cet appareil est d’assurer l’impunité aux acteurs du système bancaire, financier et sécuritaire, de leur transférer légalement le contrôle des biens communs et des droits de propriété, de concentrer tous les pouvoirs entre leurs mains. La condition est d’en finir avec la démocratie, entendue comme le choix par tous les citoyens de leur destin commun, au moyen du suffrage universel et selon le principe majoritaire. Cette fonction doit assurer le système global que les citoyens ne pourront pas décider de préférer autre chose aux promesses de plus en plus vides et de plus en plus destructrices de la croissance du rendement financier, la seule promesse que la globalisation puisse raisonnablement prétendre tenir.

C’est ainsi qu’elle assure par le droit la domination d’un très petit groupe de détenteurs du pouvoir financier, qui s’arrogent la capacité de dire le Bien, le Beau et le Vrai, contre l’égalité, la justice et la liberté.

Le droit tourne mal. C’est le constat furtif encore des peuples européens devant l’occupation juridique dont ils font l’objet, année après année et directive après directive. C’est le constat des sociétaires des banques coopératives, expulsés de leurs mandats et de leurs engagements par une mise en conformité qui nie l’histoire, les cultures régionales et les appartenances qui font les engagements durables au profit de compétences négociables et nomades. L’occupation juridique par les droits de l’individu annonce une autre occupation, celle des minorités visibles, celle des occupants qui entendent faire la loi à une Europe qui se donne pour priorité de désarmer toute résistance, comme si l’Europe n’avait d’autres ennemis que… les Européens résolus à demeurer ce qu’ils sont et qui ils sont ! Et ce constat est celui d’une corruption systémique des media, des institutions, des associations, par l’argent de l’étranger, que traduit la régression constante de la liberté d’expression et même d’opinion (suivant les pratiques de censure héritées du nazisme, les Allemands s’illustrent par leur intolérance dans ce domaine), c’est le constat d’une agression par le droit, contre les droits des peuples à disposer d’eux-mêmes – et d’abord, contre leur identité. Non seulement le droit fait des promesses qu’il ne peut pas tenir, mais le droit laisse le champ libre à des opérations de corruption à grande échelle, protège des intérêts criminels et ouvre le champ libre à des activités et à des réseaux criminels.

Les indices sont probants. La prolifération d’autorités indépendantes, de formalismes supranationaux, d’institutions internationales, de comités et de commissions dont les dispositions s’imposent aux Nations comme à leurs institutions. L’extension du principe d’origine allemande selon lequel les textes constitutionnels sont plus importants que la volonté populaire (d’où l’autorité de la cour de Karlsruhe, facilement explicable par l’exception criminelle de l’histoire allemande en Europe), principe exprimant la doctrine connue sous le nom d’ordolibéralisme. Le contrôle de la légalité des textes votés par les représentants du peuple par des cours constitutionnelles qui se sont arrogé cette prérogative à peu près sans limites (au nom par exemple de « Déclarations des Droits de l’Homme » aussi lyriques qu’éloignées de tout droit positif dans l’esprit même de leurs rédacteurs). La délégitimation de l’élection au suffrage universel (en France, Emmanuel Macron affirmant qu’il n’est pas besoin d’être élu pour être un dirigeant politique légitime), du referendum et de la démocratie, au nom de la compétence, des « acteurs sophistiqués » ayant vocation à se prononcer d’autorité de compétence par rapport au citoyen non sophistiqué dont le droit de vote doit être limité (l’expression est de Jean Tyrole, prix Nobel d’économie 2015, donc se jugeant lui-même acteur sophistiqué s’il en est). La substitution aux assemblées d’élus de commissions d’experts… faut-il poursuivre ? L’ensemble sert un véritable coup d’État du droit – et qui était en passe de le réussir, contre les Nations européennes et contre le peuple américain, avant le Brexit et l’élection de Donald Trump.

A titre d’exemple, citons l’interdiction de fait qui entoure en France comme en Allemagne les travaux de science politique sur la pratique et l’histoire du referendum, et constatons que pas une seule thèse de doctorat en sciences politiques n’a été réalisée sur ce sujet depuis vingt ans, aucun professeur n’acceptant de prendre en charge un tel sujet, nuisible à la suite de sa carrière. Et combien de thèses sur les effets de l’immigration de peuplement ? L’Union se permet de dénommer « aide à la cohésion interne », des opérations d’hébergement de migrants qui détruisent l’unité nationale et peuvent conduire demain à la guerre civile, et le droit est là, pour interdire à qui que ce soit de chiffrer, d’évaluer, d’analyser les coûts réels des migrations de peuplement.

Citons l’éminente confusion réalisée par Jean Tyrole entre biens communs et actifs marchands, quand il propose qu’un hectare de forêt primaire soit équivalent à son prix (dans un article coécrit avec Christian Gollier et publié par Le Monde, le 5 juin 2015; voir la réponse argumentée de Dominique Dron, « Le climat ne se réduit pas à un prix », dans Le Monde, 13 juin 2015, et aussi la remarque ironique de Marcel Gauchet ; « la comparabilité en valeur d’avion, de fruits et légumes, de logiciels, d’œuvres d’art et de prestations sexuelles est vouée à rester affectée d’un fort coefficient d’incertitude » ) ?

Ajoutons l’étonnante soumission des élus européens à l’ordre bancaire et financier mondial, qui les conduit à valider l’euthanasie des rentiers provoquée par la politique de taux artificiellement bas de la BCE, à entériner une réforme de la gestion d’une éventuelle faillite bancaire sur le modèle essayé à Chypre, dit «bail in», ruinant les déposants, alors que d’autres solutions ont été essayées en Islande, après 2008, comme en Moldavie (en 2014, l’État s’étant porté garant des dépôts des particuliers comme des entreprises, en couvrant leurs pertes par de la dette publique, après qu’une fraude 1 Milliard de dollars ait été décelée dans les comptes de trois des premières banques du pays). Ces solutions étaient sans doute trop dures pour le système bancaire et financier, renvoyé à ses propres turpitudes…

Et, pour finir, citons Jean-Claude Juncker qui délégitime le suffrage universel et l’expression des peuples d’Europe, en affirmant que tout ce qui met en cause les traités européens est anti-démocratique, ce qui revient à déposséder les citoyens européens du droit de vote – et à réaliser l’idéal de Jean Monnet d’abord, puis de Jacques Delors et des auteurs du tournant fédéraliste de l’Acte Unique (1986).

C’est en ce sens qu’il est juste de parler d’un «gouffre du droit » (voir Marcel Gauchet, notamment «Les droits de l’homme ne font pas une politique», Le Débat, Gallimard, 1992); la mécanique paradoxale qui permet à l’individu de se revendiquer de ses droits jusqu’à ruiner la société qui, pourtant, est seule capable de les honorer, est à l’œuvre avec une puissance que rien n’arrête. Et l’idée fausse selon laquelle le marché est autre chose qu’une institution, nourri d’une histoire et porté par une culture, idée appliquée avec constance depuis l’Acte unique jusqu’à la création de l’euro et la ratification volée de la Constitution européenne (rejetée par les referendums français et néerlandais en 2005, elle fut réintroduite à travers le Traité de Lisbonne, et adoptée par le Parlement français en 2008), aboutit au résultat qu’un Karl Polanyi aurait prévu; jamais les peuples d’Europe n’ont été aussi loin de l’unité, jamais l’idée du Traité de Rome et l’Union des États Nations d’Europe n’ont été aussi compromises.

Nous en sommes à ce moment où l’extension du droit, exprimée par l’État de droit et par les droits de l’Homme, se retourne contre la liberté, la justice, et le droit lui-même. Ses caractéristiques sont encore loin d’être entièrement décrites; c’est une raison, certes non suffisante, mais majeure, pour expliquer pourquoi certaines s’imposent sans débat, sans même que les lecteurs ou leurs représentants semblent en avoir conscience. Des dispositions d’apparence banale se présentent comme de simples améliorations techniques, sont adoptées sans analyse ni discussion, alors même qu’elles touchent à des principes, voire à la cohérence même du droit européen continental; il en est ainsi de la transaction en matière pénale, du plaider coupable, de la reconnaissance de la justice arbitrale en matière de litiges commerciaux et financiers, de l’extension insidieuse du domaine de brevetabilité des «découvertes», depuis que la «description» de caractères spécifiques non encore décrits peut à elle seule donner lieu à dépôt de brevet… Et le droit peut devenir le protecteur de pratiques criminelles, quand la conformité aboutit à un déni de responsabilité – puisque les formes ont été respectées… – et quand la loi protège des opérations criminelles, notamment de la part de banques, de fonds d’investissement ou d’intermédiaires financiers jamais confrontés aux effets de leurs actes. A quelle qualification pénale devrait répondre la spoliation des épargnants réalisée sous le masque du «quantitative easing», et dont il est estimé qu’elle a détourné 2000 milliards de dollars des patrimoines des épargnants américains, au profit exclusif du système bancaire et financier (estimation établie par Alex Pollock, R Street Institute, cité par le Financial Times, 24 janvier 2017) ? Et combien ont perdu les épargnants et les retraités européens, qui se croient bien à tort protégés par l’euro (voilà pourquoi les Pays-Bas, frappés par la manipulation des taux européens organisée par la BCE ont diligenté une étude sur la sortie de l’Union européenne, le 24 févier 2017) ?

La corruption par le droit, au nom des Droits, agit en profondeur et au cœur de l’Union dans une même direction: dévaluer, dégrader les disciplines collectives héritées ou choisies, pour promouvoir la liberté de l’individu de poursuivre ses désirs, sans par ailleurs qu’aucune interrogation ne porte sur l’origine de ces désirs, donc la nature de cette liberté individuelle… Il s’agit de fragiliser ce qui dure, ce qui demeure, ce qui constitue, pour étendre à tous et à tout la mobilité inquiète du nomade, du sans terre et du colon (lire à ce sujet Peter Sloterdijk, opus cité). Le terrorisme des minorités est le moyen employé par le système du droit pour parvenir à ses fins politiques ; éliminer l’expression même des majorités, faire taire les indigènes, et ce faisant, se débarrasser du politique, tout en laissant la politique réduite au bavardage occuper toute la place.

1 – Un nouveau système de corruption est à l’œuvre.

Une prise du pouvoir de la conformité sur la société et de la finance sur l’économie par le droit est engagée. Ses premières victimes, la liberté d’expression, le suffrage universel, l’identité nationale, sont déjà atteintes. Il faut y ajouter l’État, sujet depuis vingt ans à une épidémie nommée « réforme de l’État » qui, sous couvert d’efficacité et de conformité, veut importer les méthodes du secteur privé et aboutit globalement à cumuler confusion, impuissance et bureaucratie (la méconnaissance des singularités nationales et territoriales n’étant pas le moindre des facteurs d’échec qui interroge sur l’objectif réel des réformes engagées; efficacité ou incapacité ? ) Sans oublier la justice; les media célèbrent chaque jour les vertus humanitaires de Fondations dont les généreux donateurs ont prospéré sur la fraude et l’optimisation fiscales, le pillage des ressources naturelles, la ruine d’États et de populations…

Ce système de corruption légale a connu des développements majeurs, certains stupéfiants, au cours des quinze dernières années. C’est ce qui permet à certains auteurs de considérer que nous vivons une «entreprisation» du monde, à d’autres, que l’hyperpuissance contemporaine, celle qui a détrôné toute Nation dans ce rôle, y compris les États-Unis, est à chercher du côté des entreprises privées, le droit ayant été le moyen de leur prise de pouvoir. Il serait plus juste de considérer que, sous le couvert de la lutte anticorruption, ou plutôt, contre ce que les autorités internationales désignent comme corruption, un système global de corruption des mœurs, des lois, de la propriété et de la conscience s’est mis en place (l’un des exemples de ce système étant donné par Facebook, ou les techniques qui conduisent au renforcement des convictions : voir à ce sujet l’analyse de Jean-Louis Gassée, «Facebook Journalism», in Monday Note444, 22 janvier 2017).

1 – Un coup d’État invisible.

Un coup d’État du droit a eu lieu. Il est de lourdes conséquences politiques; la dictature du droit instaurée par la Cour de Justice européenne contre les Nations a contribué pour une part significative au vote britannique en faveur du Brexit. La forfaiture réalisée par la Présidence française, faisant adopter par une majorité de parlementaires complices un traité de Lisbonne reproduisant le projet de Constitution européenne désavoué par la volonté des Français, clairement exprimée par referendum, pèsera longtemps sur les relations entre les Français et leurs élus.

Ce coup d’État du droit contre les peuples a pour conséquence l’abandon programmé de la pratique du referendum dans l’Union européenne, alors que ce mécanisme est au cœur de toute démocratie réelle, comme la Suisse en donne l’exemple, et que la normalisation de la vie politique allemande pourra se mesurer au retour du referendum dans les pratiques politiques admises (aujourd’hui encore, la Constitution l’exclut). L’accompagne la marginalisation du recours au scrutin majoritaire pour former une décision publique; la dilution des responsabilités va de pair avec la multiplication des filtres, des intermédiations, des brouillages, qui rompent la relation de légitimation par le vote des décisions publiques (la hiérarchie des règles, qui voulait que la Constitution s’impose au suffrage universel, et que le suffrage universel s’impose au droit et décide des lois, directement par le referendum ou indirectement par ses représentants aux Assemblées, est renversée). Et il a pour conséquence de rendre de plus en plus difficile aux Européens d’entretenir la conscience historique, politique et sociale de ce qu’est la démocratie, de ce qu’elle signifie et de ce qu’elle engage. A la fois leur conscience de ce qu’ils sont, leur capacité à nommer les difficultés qu’ils éprouvent et les problèmes qu’ils rencontrent, la possibilité donc d’en débattre, se trouvent comme annihilés par l’orientation générale du droit, un droit étranger à leur histoire et à leurs singularités. Comme interroge Yves Michaud, « qui sait comment sont nommés, et à quel titre, les 47 magistrats de la Cour Européenne des Droits de l’Homme?» (cité par Causeur, février 2017). Qui le sait, en effet ?

Le coup d’État du droit s’est passé dans l’indifférence générale. C’est à la faveur de ce «benign neglect » que l’extraterritorialité du droit peut gagner, s’affirmer, et accréditer la notion d’un droit mondial, de l’indifférenciation politique et de l’obéissance bénéfique. C’est à la faveur de cette indifférence qu’au nom du droit, des minorités refusent le résultat des élections, menacent de faire sécession, et veulent étendre à la société le règne du consommateur que son argent doit préserver de toute contrariété – l’industrie du spectacle californien et la Silicon Valley en donnent les exemples.

Des media aux instituts de recherche, des Fondations et think tanks aux séries TV et aux Universités, un grand nombre d’organisations pèsent sur le débat public et l’information, en faveur d’une globalisation affirmée inévitable, souhaitable, et bonne (à titre d’indication, qui sont les «économistes » qui publient les revenus tirés du conseil aux banques, ou des conférences et prestations assurées pour le compte de gérants de fonds qui font d’eux leurs agents marketing ?) Ces « fake news» des media dominants, cette fabrique de la vérité, qui devient rapidement une fabrique du consentement, cette propagande au bénéfice de la finance mondiale, pour l’ouverture des frontières, pour le nomadisme généralisé, pour un multiculturalisme subi et non choisi, sont la forme la plus actuelle et la plus présente de la corruption – la transformation des lois et des mœurs par l’argent de l’étranger – et peu importe qu’il vienne de Washington, de Dubaï, ou de Bruxelles. Les moyens dont elle dispose sont multipliés par la place des réseaux sociaux et des moteurs de recherche dans l’information, donc par le pouvoir des algorithmes qui trient, éliminent, valident ou invalident la diffusion des données selon les préférences de leurs commanditaires. C’est ainsi que les nouveaux empires du Web poursuivent et entendent gagner le combat contre les Nations (lire Cathy O’Neil, «Weapons of Math Destruction», 2016). Voir à ce sujet les opérations de filtrage réalisées par Google, qui s’arroge un pouvoir totalitaire de décider du Bien et du Vrai !

Le nouveau dispositif de corruption que représentent ONG, think-tanks et Fondations, la nouvelle fabrique du consentement que mettent en place les GAFA comme le BAT chinois (Alibaba, Baïdu, Tencent) mériteraient plus d’attention, et une enquête européenne approfondie (notamment quant aux opérations de déstabilisation d’Etats ou de manipulations électorales dont les organisations financées par Georges Soros sont les auteurs avoués, et dont la France, avec la Pologne et la Hongrie, est l’une des cibles privilégiées). Qu’il s’agisse d’imposer les OGM en menaçant de supprimer l’aide alimentaire aux pays rétifs (exemple du Malawi), de modifier les lois de pays respectueux des traditions et des mœurs au profit de minorités agressives (exemple de l’Inde, de l’Ouganda, de la Russie), ou d’acquérir le temps de cerveau malléable de jeunes enfants en offrant leurs écrans aux systèmes scolaires assez naïfs pour les accepter (une ministre française est assez naïve pour suggérer que les visites scolaires puissent avoir pour objet… un Apple store!), un dispositif étendu de corruption, porté par l’argent américain, chinois, saoudien ou russe est en place et se développe.

Ces dérives sont au service d’intérêts privés et elles révèlent l’affaiblissement au moins relatif de l’État dans ses fonctions de garant, de justice et d’équité. Elles représentent un véritable détournement de pouvoir par des élites mondialisées, au détriment à la fois des États-Unis, de l’Union européenne, et des peuples partout dans le monde.

Par sa sensibilité aux actions des lobbyistes, motivés par la dimension de son marché intérieur, et aussi par la perméabilité de ses institutions, l’Union européenne est une cible privilégiée des actions des organisations globalistes. Ceux qui rencontrent dans les Nations européennes des résistants trouvent à Bruxelles des collaborateurs ; les cas des OGM, celui de SWIFT, des données privées des citoyens européens ou des données du trafic aérien, des ratios bancaires et assurantiels ou de l’industrie pharmaceutique ne sont quelques exemples d’une perméabilité qui trouve peu de contre-exemples (en dépit des actions récentes de la commissaire Margrethe Vestager, notamment au sujet des conditions fiscales accordées à Apple par l’Irlande). Des circonstances historiques sont constamment invoquées, à tort ou à raison, pour interdire le débat et pour condamner l’Union européenne à envisager chaque pas en avant comme un recul des Nations qui la composent, comme si l’Union ne pouvait trouver sa force que dans le dessaisissement et le repli de ce qui la constitue – comme si l’Union ne pouvait exister que si l’Europe disparaît! Cette situation explique l’exposition des entreprises de l’Union européenne à la législation américaine, et l’absence de réponse appropriée à l’extraterritorialité conquérante du droit américain naguère, d’un droit global demain, inspiré par des entreprises globales ayant leur siège à Dubaï, Abu Dhabi, ou aux Iles Caïman. Elle explique plus profondément un conflit montant entre les institutions européennes, la Cour de Justice européenne, la Cour européenne des Droits de l’Homme, et les peuples de l’Union européenne, un conflit portant par exemple sur la privation des droits civiques des condamnés emprisonnés qui est au cœur de la décision de sortir de l’Union votée par le peuple de Grande Bretagne, nommée «Brexit».

Ces dérives révèlent un nouveau modèle de corruption, largement répandu, mais relativement aveugle à l’observation, notamment parce qu’il s’est doté dès l’origine des plumes qui lui réservent le monopole du Bien – ou la prétention à le détenir.

Ce système de corruption, s’il est de naissance et de constitution typiquement américain, n’est en rien attaché aux États-Unis. Il est même probable, et même, observable, que d’autres puissances, à la fois privées et publiques, agissent de même. A cet égard, les pratiques chinoises dans le domaine du commerce extérieur, des transferts de technologie, de la censure du Web, ou des Instituts Confucius, mériteraient aussi l’attention. Et que dire des postures des géants du Web en faveur de la mobilité, du multiculturalisme, de la chute des frontières, comme Air BnB, Google, Facebook et autres les assument régulièrement, y compris dans les «Chartes » qu’ils imposent à leurs clients, au mépris de la liberté de conscience, au mépris encore plus des mœurs et des Nations !

De sorte que ce sont des actions hybrides, combinant public et privé, affaires et diplomatie, institutions et ONG, qu’il faut considérer pour comprendre le nouveau système de corruption qui se met en place. Au temps des Fondations et des ONG, que les valises de billets ou les commissions sur des comptes numérotés sont loin ! De sorte aussi que c’est à de vastes captations réglementaires qu’il faut être attentif; pas seulement au marché du droit, mais aussi à des détournements, ou à des hold up du droit, comme ceux que réalisent régulièrement établissements bancaires et financiers afin de sécuriser les profits criminels réalisés contre l’intérêt collectif !

Une enquête européenne sur les dispositifs de corruption des Nations par le biais des ONG, des Fondations, des moteurs de recherche et réseaux sociaux, des media, serait capitale pour informer les Européens des pouvoirs invisibles dont ils subissent les insidieuses et permanentes contraintes.

2 – Les entreprises sont au cœur du dispositif corrupteur des sociétés humaines.

Le dispositif d’extension du droit et de la conformité agit en trompe-l’œil. Dans un premier temps, il semble favorable aux entreprises ; il leur permet de s’affranchir, pour une part croissante de leur activité, de ces archaïsmes que seraient les Nations, les frontières et les singularités nationales, exprimées par les procédures démocratiques ou généralement considérées comme telles; élections au suffrage universel, référendum, etc. Et il vient légitimer une artificialisation du monde dont l’entreprise privée est l’acteur premier, souvent inconscient, artificialisation qui tend à supprimer tout ce qui était, naturel, donné, gratuit, par ce qui est fabriqué, normé, payé son prix – mais à quel prix ? Et pour quoi ?

En réalité, dans un second temps, ces dispositions confortables, accommodantes voire outrageusement biaisées en faveur de la finance et de l’entreprise, pourraient bien s’avérer recéler un piège redoutable. Ces dispositions ont un effet un point commun: elles affranchissent l’entreprise de ses relations avec son milieu, ce qu’un organisme vivant ne peut longtemps supporter sans dommages. Une entreprise en apesanteur est une entreprise à problèmes. Et une entreprise qui détruit la société dont elle tire ses revenus a, ou aura, des problèmes.

Nous avons analysé sommairement le mécanisme par lequel les indicateurs de RSE instrumentalisent les entreprises privées contre les Nations et contre les sociétés humaines. Les entreprises prises dans ce système de corruption deviennent les pires ennemies des sociétés dans lesquelles elles opèrent. Certaines ont même la prétention de diriger ces sociétés. D’autres se constituent en Empires, jouant avec les lois fiscales et sociales, et entendent de la même manière jouer avec les lois concernant le contrôle des frontières, les normes techniques et environnementales, les préférences collectives, etc. (à l’instar des GAFA luttant contre la décision de fermer l’entrée du territoire américain aux ressortissants de sept États jugés soutenir le terrorisme islamiste, en février 2017, au nom de leur idéologie libertaire et sans frontièriste).

Au temps de l’État-nation devenu forme de la modernité politique, les entreprises qui se livrent à cette aventure doivent être conscientes des risques qu’elles prennent. Les entreprises qui souscrivent à l’utopie de la diversité des individus, à l’idéologie du nomadisme et du sans-frontiérisme, et participent aux agressions contre les Nations réalisées en leur nom sont inconscientes de la posture d’ennemi qu’elles prennent à l’égard de toute société soucieuse de son identité, de sa frontière et de son unité interne. Elles se font les ennemies de l’ordre politique, de la démocratie et de la liberté des Nations. Et l’ordre politique moderne, qui est celui de l’État Nation, les condamne comme il condamne les forces privées qui se prennent pour des empires au-dessus des lois et des frontières, des empires susceptibles de réconcilier les langues, les cultures et les identités dans leur ordre supérieur – l’empereur d’Autriche Hongrie ne détenait pas moins de 40 titres de roi ou de prince, mais le mouvement d’États Nations forts de leur unité interne l’a balayé comme il a balayé avec l’URSS le dernier empire existant !

Il importe que les entreprises mesurent le risque qu’elles encourent à sortir de leur territoire de légitimité. Car ce risque est présent, immédiat, et destructeur. Cette forme sociale récente, datée et localisée qu’est l’entreprise privée pourrait ne pas lui résister (la réalité de l’entreprise privée et de la séparation des intérêts qu’elle recouvre est à peu près inconnue en Chine, en Russie ou ailleurs). C’est le risque du hors jeu. Le fossé qui sépare leur intérêt direct, «corporate», et les intérêts des groupes sociaux ou des Nations dans lesquelles elles opèrent est devenu considérable. Pour le dire ainsi, les sociétés privées continuent d’opérer dans le cadre de Nations et de sociétés dont elles semblent n’avoir de but plus urgent que de les détruire de l’intérieur. Les difficultés croissantes des sociétés multinationales à croître, voire seulement à maintenir leur rentabilité, sont les premiers indices d’une situation qui peut bouleverser tout ce que nous croyions savoir du pouvoir de ces groupes et de leur résilience ( voir les exemples de Mac Donald et de Kentucky Fried Chicken; lire «The Fall of Multinational companies » The Economist, Février 2017).

Séparation à l’extérieur, séparation à l’intérieur; le plus grand risque pour les entreprises qui cèdent à l’illusion globale, et qui se laissent prendre aux facilités de la compliance globaliste, est de devenir étrangères partout, hors sol, refoulées, ennemies.

3 – Un combat à conduire.

L’Union européenne est comme sidérée par une idéologie globale, celle «Soros, Davos, Goldman Sachs » ou «SDGS», qui est en voie de disparition partout ailleurs dans le monde, et qui a perdu sa base arrière, Washington. L’impunité des Fondations et des ONG est derrière nous. Le droit qui les a complaisamment protégé n’est plus notre droit. Il ne peut plus leur assurer l’impunité, à eux, aux media et aux officines qui les ont promues. Et la naïveté qui leur a ouvert les financements européens, les assemblées européennes, et la complaisance des institutions européennes, est également derrière nous. C’est pourquoi il est décisif que ce système de corruption soit identifié, défini, et neutralisé. C’est pourquoi il est vital que l’Europe et les Nations européennes entreprennent résolument de comprendre, d’analyser et de traquer pour dénoncer ou pour poursuivre. Ce système relève de la croyance plus que de la force, de la conviction plus que de la contrainte; il fabrique du consentement plus que de l’obéissance; il conduit des individus désaccordés à chercher dans l’extension indéfinie du droit et dans la conformité les certitudes dont ils sont privés par ailleurs; c’est par les mêmes moyens qu’il sera détruit.

2 – L’effet inédit, et pourtant prévisible, est une nouvelle séparation du monde.

Non seulement la globalisation échoue à imposer l’unicité des règles, mais elle a un effet contraire; elle exacerbe les différences et suscite le refus. La seule légitimité des organisations multinationales ou supranationales est d’assurer la fluidité des politiques extérieures des États-nations, et la légitimité des entreprises multinationales ne s’entend pas autrement que dans la contribution qu’elles apportent à leur pays d’origine. Passé le premier temps de sidération naïve et de ralliements inconditionnels à la globalisation, les réactions s’organisent, et une véritable « insurrection de la différence» se fait entendre. Les peuples reprennent leurs droits, même si leur expression est brouillée par les formes politiques paradoxales ou monstrueuses qu’elle peut emprunter.

De même que les États-Unis ont essayé d’instrumentaliser un droit global pour poursuivre un intérêt qu’ils croyaient national, de même d’autres puissances cherchent ou vont chercher à utiliser leur capacité réglementaire et normative pour fixer des lois universelles – autant de provinces qui se prennent pour le monde, mais qui peuvent déclencher une guerre du droit bien réelle !

1 – La séparation s’organise, et nombre de pays sont indemnes de la guerre du droit.

Face au globalisme, nombre de pays ont construit des solutions nationales ou régionales pertinentes.

La Chine a criminalisé la publication des comptes des entreprises chinoises. Allez donc chercher à connaître les comptes de Hua Wei, de CINOPEC ou CNOOC, etc.! La Chine a réagi au droit américain, qui fait obligation pénale aux prestataires américains, experts comptables, sociétés de conseil, sociétés d’ingénierie, mais aussi hébergeurs de «cloud», de rapporter au DOJ toute information susceptible de constituer une infraction pénale au droit américain de la part de leur client, en organisant l’élimination des prestataires américains, auditeurs, consultants, avocats, de ses entreprises stratégiques – qu’attend l’Europe pour en faire autant? Qu’attend la France, assez naïve pour qu’un Ministre socialiste de l’Économie ait confié la définition des chantiers stratégiques de la France à… un cabinet de consultants américain, trop heureux de spécialiser la France dans la sous-traitance américaine ! Ou bien pour qu’un conglomérat dans lequel des collaborateurs notoires des intérêts américains et alliés se soit vu confier la création d’un cloud français, dès le départ condamné à l’échec par la trahison prévisible d’un de ses partenaires ! Et la Chine, avec Ali Baba notamment, dispose du premier moteur de recherche mondial, un moteur de recherche dont le Parti Communiste Chinois lui-même s’inquiète qu’il détienne plus de données sur la Chine que le Parti lui-même !

La Russie a réagi à l’intrusion américaine effectuée à partir des données privées des internautes naïfs, en contraignant tout hébergeur à localiser ses serveurs contenant des données privées de citoyens russes, sur le territoire russe, évitant ainsi le pillage de ces données, et les soustrayant par principe au juge américain ( l’utilisation d’un serveur hébergé aux États-Unis suffit pour établir la compétence du procureur américain ; les entreprises françaises et européennes ayant recours aux clouds de prestataires américains, à Salesforce, IBM, etc., doivent être conscientes du risque qu’elles prennent!) Qu’attend la France, qu’attendent les puissances européennes, pour se mettre à l’abri du pillage américain organisé des données privées de leurs internautes, et des données de leurs entreprises ? Et, de même, la Russie a développé un moteur de recherche russe, qui permet aux internautes russes de demeurer dans leur univers de référence et dans la constance de l’intérêt national russe.

Les pays africains, et sans doute d’autres dans le monde arabo-musulman après eux, n’adhèrent plus au Tribunal Pénal International ( TPI), ce tribunal qui entendait juger les crimes imputés aux dirigeants politiques après qu’ils aient perdu le pouvoir, par les urnes ou par un coup d’État. L’Afrique du sud, la Gambie, le Soudan, la Russie, les Philippines, et combien d’autres, entendent se retirer d’un simulacre de justice rendu au TPI, qui prétendait appliquer des critères universels à des situations singulières, et dont le plus sûr effet était de rendre plus délicate la sortie des dictateurs ou des chefs de guerre sans jamais désigner les crimes des gagnants- l’ordre globaliste. Le «deux poids, deux mesures » si souvent manifeste – seuls, les perdants sont convoqués au TPI, aucun des complices des États-Unis ou de l’Union européenne, par exemple dans les Balkans, n’y a jamais été déféré – a joué en ce sens.

Et, en Europe même, l’application des lois américaines, des embargos américains et les sanctions qui leur sont liées, suscitent un mouvement d’indignation qui cherche ses voies, mais qui peut déboucher sur la séparation de banques et d’entreprises d’avec tout ce qui peut appartenir au système américain et les exposer à la juridiction des États-Unis.

L’effet attendu de l’extraterritorialité des lois américaines n’est pas celui qui était attendu. Non seulement le monde n’est pas en train de s’aligner sur une règle unique, comme ceux qui rêvaient d’un gouvernement mondial, l’attendaient; il est en train d’exclure les entreprises qui s’y soumettent.

La situation, bien connue de Donald Trump, est que les entreprises américaines et européennes se sont de leur faute fermé les marchés africains et certains marchés asiatiques.

La situation, bien connue des entreprises européennes, est que les marchés russes (notamment agro-alimentaires) sont définitivement perdus, du fait des sanctions qui ont attiré des contre-sanctions russes, que la Russie est désormais en autosuffisance alimentaire et que les marchés asiatiques se ferment eux aussi. Une grande partie de l’Afrique effraie les entreprises occidentales prises au piège de la conformité, laisse le champ libre à des entreprises chinoises, hindoues ou autres, qui n’appliquent aucune conditionnalité à leurs opérations d’investissement ou de commerce, et que des marchés aux lisières de l’Union européenne, comme le marché turc, comme les marchés moyen-orientaux, sont eux aussi perdus – ou en train de se fermer.

La situation est aussi que des banques européennes, touchées ou non par les sanctions américaines, ont procédé à un recensement mondial de leurs risques-pays au regard des lois et embargos américains et en sont arrivés à la conclusion que, dans maints pays, soit pour raisons objectives de généralisation de la corruption, soit pour raison plus subjective de conflit avec les États-Unis, il n’était pas possible de poursuivre leur activité au niveau de risque souhaité. Ce qui a conduit des banques comme HSBC, BNP Paribas, Société Générale, etc., à fermer leurs implantations dans plusieurs pays, jusqu’à une vingtaine au total ( alors que certaines banques américaines y demeurent actives !) Ce qui signifie aussi que les entreprises qui sont ou voudraient être actives dans ces pays se trouvent face à l’incapacité de réaliser les transactions bancaires et les opérations de financement qui leur sont nécessaires.

Dans d’autres domaines, au regard des prescriptions de l’OCDE et des exigences de reporting, notamment à la Banque mondiale, ce sont des entreprises industrielles, de BTP et de services, qui se tiennent éloignées de certains pays, voire de certains continents, comme l’Afrique, où les risques d’être accusé de corruption sont trop importants (avec pour sanction le «debarring», ou exclusion des appels d’offre des institutions internationales).

Ajoutons que, malgré les apparences, l’importation de notions étrangères dans les pays asiatiques, africains, sud-américains, même là où la lutte contre la corruption ou la fraude fiscale est approuvée par la population, est un facteur de conflit et un désavantage compétitif pour les sociétés occidentales qui les soutiennent, bon gré, mal gré ( voir ci-dessous).

De sorte qu’une nouvelle carte du monde se dessine, dans laquelle les dérives du droit multiplient les séparations, selon la nature des modèles juridiques et des pratiques légales en cours. Les postures géopolitiques ont moins à voir dans cette situation que le sentiment généralement partagé de l’injustice provoquée par l’imposition d’un droit étranger aux mœurs, hostile aux traditions, et méprisant à l’égard d’équilibres sociaux et politiques subtilement élaborés au cours de générations et de siècles – un droit imposé de l’extérieur n’est jamais autre chose qu’un droit colonial, il ne suscite jamais autre chose que la résistance. Et un droit qui ne respecte pas les mœurs et les traditions n’est rien d’autre que le pire ennemi des peuples – au sein de l’Union européenne, il vaudrait la peine de s’en souvenir.

Le droit n’est pas un produit d’exportation. Quand il le devient, c’est qu’une transformation de sa nature est en cours. Et s’il le devient, c’est qu’une transformation de nature du capitalisme est en cours, qui appelle, qui requiert le droit pour poursuivre sa course.

2 – L’effet futur est à l’affrontement des droits

La situation qui voit les entreprises s’émouvoir de l’extraterritorialité du droit américain est déjà dépassée. D’ores et déjà, la soft law de la puissance commerciale et financière, de la puissance militaire, de la puissance culturelle est à l’œuvre. D’ores et déjà, sous le masque de systèmes et d’outils mondialisés, les acteurs publics et privés sont confrontés à des exigences d’allégeance ou de soumission croissantes dans différentes régions du monde. D’ores et déjà, la guerre pour l’économie de la donnée, la guerre pour imposer le futur droit économique fait rage ( lire à ce sujet Henri Thomé, « Les Etats et l’Europe face à l’économie de la donnée », Questions d’Europe, n°423, février 2017). Et, d’ores et déjà, la concurrence des mémoires fait place à l’affrontement des droits, et à cette révélation ; la prétention universelle de provinces qui se prennent pour le monde, et de modèles juridiques datés et circonstanciés, à s’imposer partout dans le monde, est conflictuelle par nature. Elle entraînera plus tard, elle entraîne déjà, une confrontation des systèmes juridiques qui est l’un des aspects du conflit des civilisations, et qui est et sera d’autant plus violent que du droit voudra s’imposer contre les mœurs, les traditions et les préférences collectives, au mépris des peuples, des Nations et de leur liberté de se déterminer eux-mêmes pour eux-mêmes.

1 – L’imprescriptibilité de certains crimes et l’ouverture d’un droit à réparation ou restitution sont deux idées généreuses, justes, dont l’application concrète est lourde des pires problèmes, en ce qu’elles affirment que le droit peut effacer l’histoire, ou en corriger les effets.

Les États-Unis peuvent prétendre, jusqu’à un certain point, avoir corrigé les effets du génocide indien en garantissant des terres à leurs enfants et petits-enfants, et en assurant aux plus entreprenants des revenus importants, grâce aux casinos et salles de jeu. Pourquoi ne pas indemniser les descendants d’esclaves qui ont contribué à construire l’Amérique, qui sont morts par millions et qui s’estiment fondés à réclamer des indemnités pour crime contre l’humanité, déclaré imprescriptible, donc justifiable d’un financement dont certains considèrent qu’il serait plusieurs fois supérieur au total de l’aide au développement des USA (rappelons que les esclaves noirs américains libérés après la guerre de Sécession et l’assassinat de Lincoln, l’ont été sans aucune indemnité, contrairement à ce que voulait ce dernier) ?

Régulièrement critiqués pour leur consommation d’énergie et la vigueur de la demande d’énergie chez eux, des pays comme l’Inde ou la Chine répondent mezzo voce à ce jour, qu’ils seraient fondés eux aussi à demander des réparations légitimes pour la grande famine qui a tué par millions des tisserands du Bengale, en 1812, de même que les Chinois seraient fondés à exiger des indemnités pour les deux guerres dirigées contre eux, en 1850 et 1862, dans le seul but d’obliger l’Empire à s’ouvrir au commerce de l’opium et à intoxiquer sa population tout en faisant la fortune des marchands anglais… Par la promotion de la transparence ressentie comme une agression extérieur, par le développement d’entités non étatiques aux missions étatiques vécues comme subversion, par la censure des autres formes d’organisation, par la censure des idées, des faits qui ne servent pas son projet, la globalisation appuie sur le droit une formule autoritaire de contrôle qui peut à tout moment devenir belligène ( comme elle l’a été tant de fois entre 1980 et 2013).

Que se passerait-il si tous les peuples du monde demandaient des indemnités pour des faits historiques commis voici cent, cinq cent ou deux mille ans ?

Le droit entreprend d’en finir avec l’histoire, à grands frais. Le droit qui ignore que l’oubli apaise, que le secret permet tout, et que le temps doit remplir sa fonction, qui est d‘étendre le voile de la mémoire sur la passion des hommes.

2 – Les pratiques socialement acceptées et institutionnellement reconnues de la corruption
diffèrent fondamentalement de la Chine à l’Afrique et du bassin méditerranéen à la Norvège.

Diffèrent les montants légitimes au regards de l’opinion, les destinataires autorisés, la nature des cadeaux ou des incitations reçues. Dans tel pays du sud africain, il était communément accepté que la famille présidentielle prélève jusqu’à 25% des contrats internationaux, la révolte s’est déclenchée quand la même famille a voulu capter 50% de ces contrats! Dans tel pays asiatique, la corruption se limitait à des cadeaux ou prestations en nature, à l’occasion de cérémonies familiales dont la communauté bénéficia toute entière; le système est devenu intolérable quand des commissions en espèces, au bénéfice exclusif de leur destinataire, ont été imposées. Dans telle île de l’Océan Indien, la corruption doit bénéficier à tous les membres de la communauté; sinon, «on lui met le feu» ; celui qui a voulu s’enrichir seul court le risque de tout perdre…

Ces disparités ne sont pas les seules. Elles s’appliquent tout aussi bien aux notions de responsabilité individuelle, de punition des fautes, ou de critères de jugement. La justice chinoise fait une large place à la responsabilité collective, en vertu du principe selon lequel la famille, les voisins, les amis, ne peuvent pas être totalement étrangers au passage à l’acte criminel, par exemple, d’un mari jaloux, et qu’ils pouvaient agir, parler, prévenir, alors qu’ils n’ont rien fait. Le principe de la responsabilité individuelle strictement conçue est propre à l’Occident; est-ce une raison pour étendre ce droit à la Chine, ou n’est-ce pas la Chine qui va étendre son droit de la responsabilité collective ?

Des écarts majeurs existent en matière de sanction des crimes ou délits, selon que l’essentiel soit la punition de la faute, ou la réinsertion du coupable dans la communauté dont il est membre. Les sociétés fermées privilégient la réconciliation, que des peines trop sévères rendent problématiques ; les sociétés ouvertes, la punition, qui se doit d’être exemplaire pour inspirer la crainte, et substituer la peur du châtiment à l’absence de consensus collectif sur la faute et sa sanction ( voir «The world before yesterday », Jared Diamond, 2015).

Les régions ou les communautés traditionnelles sises en Inde ou en Ouganda ont des pratiques diverses en matière d’attitude à l’égard de l’homosexualité, des représentations très explicites pouvant avoir lieu lors de fêtes religieuses, ou bien encore des transsexuels (travestis) étant considérés sacrés et méritant l’aumône dans les trains ou les gares routières qu’ils parcourent en rançonnant les passants complices… Derrière la grande diversité des situations locales, ces deux pays ont conservé des lois qui punissent l’homosexualité. L’affirmation selon laquelle ces législations les mettent an ban des Nations et méritent les sanctions les plus graves fait sourire un Européen qui se souvient des lois américaines à ce sujet, voici seulement vingt ans, le sérieux des procureurs n’a d’égale que leur prétention et leur amnésie, et plus gravement, nul se s’interroge; et si ces pays voulaient eux aussi nous imposer leur législation ?

Des réflexions analogues pourraient concerner la majorité sexuelle et la tolérance aux relations sexuelles avec des mineurs, la législation de la prostitution et de la pornographie, celle du statut de la preuve ou de l’aveu en procédure pénale, etc. En aucun cas, la supériorité du droit occidental n’apparaît de nature à justifier l’imposition, parfois violente, de ce droit sur les mœurs et les systèmes juridiques locaux qu’il veut remplacer. Il est temps de citer Alfred Métraux : « A toutes les grandes questions de la vie et de la mort, de la justice et du pouvoir, des sociétés que nous disons primitives ont apporté des réponses bien supérieures aux nôtres ».

3 – L’importation d’un droit étranger aux mœurs, aux traditions et aux préférences collectives, est un facteur de déstabilisation d’abord, d’agression ensuite, et pour finir, de colère et de conflit. Quelle sera à terme la réaction des pays moralement déstabilisés, humiliés et en état d’occupation morale et juridique par les ONG, les Fondations et autres bras armés du Bien occidental? Et celle des populations qui vivent l’occupation numérique, puis la destruction de leurs structures sociales et de leur organisation politique par les nouveaux empires, tels Uber, AirBNB, etc., qui prospèrent grassement sur la liquidation des sociétés ordonnées et l’instauration de nouvelles formes d’esclavage ?

Que sera-ce si les nouveaux géants économiques et militaires, forts de leur succès, entreprennent eux aussi d’étendre le droit à tout ce qui commerce, échange, diffuse chez eux?

Qu’en sera-t-il si la Chine, l’Inde, la Russie, imposent leur droit, non comme référence universelle, mais dans leur zone d’influence, de marché ou de civilisation? La force d’attraction de la Russie pour les chrétiens conservateurs devrait attirer plus d’attention (lire à ce sujet: «How Russia became the leader of the global Christian Right », Casey Michel, Politico, 9 février 2017), comme la séduction du «modèle chinois» pour les régions du monde accablées de l’arrogance occidentale! Qu’en sera-t-il si les actions d’influence convainquent certaines institutions mondiales que des clauses de « respect des Droits humains » doivent être intégrées dans les contrats commerciaux, et dûment sanctionnées? Est-ce la nouvelle version du «Bien contre le Mal » et de « the West » contre « the Rest » qui s’écrit, la secte globaliste tenant la plume?

La perspective proche est de voir les acteurs privés confrontés à plusieurs systèmes juridiques, à plusieurs exigences inconciliables, et à plusieurs logiques qui s’excluent mutuellement. Et la perspective prochaine est aussi de voir des acteurs privés enserrés et étouffés dans des impératifs juridiques contradictoires, venus de cultures et de modèles publics différents, et inconciliables entre eux.

4 – La diversité des sociétés humaines est en danger chaque fois que le droit s’abstrait des
mœurs, des territoires et des choix politiques des Nations pour elles-mêmes.

L’idée même d’une loi universelle contredit l’essence de l’esprit politique du monde, qui est la diversité des lois, des institutions, de la justice, telle qu’elle procède de l’histoire, des cultures et des identités collectives. De même, l’idée d’un marché mondial est un contre sens, tant un marché est une institution portée par une politique, donc une singularité.

Il serait facile de défendre cette idée dans le domaine culturel, celui des mœurs ou des politiques publiques. Elle a trouvé sa meilleure illustration dans le geste familier d’un Président français, jadis pris sur le fait au moment où il glissait dans sa poche un cendrier de la Maison Blanche ! Scandale vite étouffé, mais ce qui pour lui était un aimable souvenir, dans une tradition méditerranéenne accommodante, était pour ses hôtes imbus de la meilleure tradition protestante, un vol, purement et simplement !

Prenons au plus serré, le sujet de la corruption.

La corruption fait partie des institutions informelles qui résultent d’un consensus local, national, culturel, qui obéissent à des règles implicites, et qui font partie d’un ordre extralégal, et parfois supra légal, qu’il est impossible de balayer d’un trait de plume.

Il ne s’agit ni de faire l’éloge de la corruption, comme un haut fonctionnaire français du Ministère des finances s’y était naguère essayé, ni de prôner une quelconque tolérance à l’égard des faits de corruption. Il s’agit seulement d’observer que la perception des actes et des faits de corruption a changé au cours du temps – quel journaliste, voici dix ans, se serait cru obligé de publier le détail des menus consommés lors d’un déjeuner ou dîner professionnel, comme le font les journalistes du Financial Times ? Quel magistrat, voici quinze ans, se serait ému des conditions d’obtention d’un contrat d’armement pour l’industrie de son pays, qu’il soit britannique, américain ou français ? A chacun de faire respecter sa loi chez soi ; la règle, qui signifiait que la chasse était libre à l’extérieur des frontières, avait sans doute bien des inconvénients, mais un avantage ; elle ne prétendait pas imposer une règle universelle, donc étrangère à chacun, elle respectait la diversité des mœurs, des cultures, des sociétés.

Traiter de la corruption en Chine comme au Mexique et en RDC comme au Danemark, c’est simplement nier la diversité des sociétés humaines et des arrangements qui assurent leur continuité et leur pacification interne. C’est, par exemple, vouloir imposer en Afrique un individualisme radical qui est l’exact opposé de la famille étendue, et s’arroger le privilège moral qui consiste à condamner l’une pour favoriser l’autre – au nom de quoi ? C’est, en Asie, nier l’importance des signes matériels de reconnaissance de la hiérarchie et de l’appartenance, essentiels à la résilience de l’ordre social, de la paix sociale, et de la confiance. Et c’est nier les préférences collectives qui s’expriment dans le cadre politique, local, régional ou national.

5 – Les sources cachées du droit universel qui sont l’intérêt du capital et la mise en marché de la planète, du vivant à l’eau et de la reproduction humaine aux terres arables, ne sont pas cachées pour tous.

Alexander Lebedev ( ancien gouverneur de la Banque centrale de Russie) estime que les impôts et taxes soustraits aux pays africains, non par la corruption, mais par l’entretien à dessein de guerres civiles ou de rébellions armées par les investisseurs occidentaux, représentent deux fois le total de l’aide au développement! Le droit universel, très prompt à condamner les chefs d’État africains pour leur mode de vie ou leur autoritarisme, l’est beaucoup moins à condamner les banques et gestionnaires de fonds qui permettent à ces mêmes chefs d’État de détenir, place et faire gérer en toute sécurité les fonds détournés des finances publiques de leur pays, et qui, ce faisant, échappent aux éventuels bouleversements politiques. Moins encore à condamner les spécialistes de l’optimisation fiscale et de la grande fraude, surtout quand ils jouent les mécènes humanitaires !

Les droits collectifs, nationaux, locaux, communautaires, non seulement sont bafoués, mais sont réputés ne pas exister face au droit de l’individu, si aisément réduit à la poursuite par chaque individu de son intérêt particulier, sans limites et sans frein. L’avènement de l’individu signifie que toute communauté détentrice de droits indivis ou de biens communs (terres, énergie, eau, espèces rares, etc. ) est à la merci d’un individu qui voudra déchirer le pacte collectif, récupérer sa part du gâteau, et transformer une part du commun intangible et sans prix, en son équivalent monétaire marchand. Et le droit de l’État de droit, impuissant à prévenir ou sanctionner le pillage des ressources et la destruction des milieux de vie, sera très efficace pour assurer à cet individu toute capacité de détruire les biens communs de sa communauté.

Le droit a été détourné au service de la globalisation du marché et de son universalisation. Tout peut se vendre, tout peut s’acheter, donc tout est dans la maison du marché, sous la forme du contrat, exclusivement sujet au droit. Voilà qui organise fort bien le pillage des ressources spécifiques d’une société ou d’une Nation. A côté des paradis fiscaux qui drainent les capitaux, il faut considérer qu’existent tout aussi bien des paradis sociaux pour drainer les jeunes actifs de pays déshérités, des paradis entrepreneuriaux qui séduisent les meilleurs de chaque génération et privent leur pays d’origine de leurs compétences et de leurs énergies – le brain drain est une ressource cachée de l’Amérique et de la Grande-Bretagne ! – et qui représentent tous à leur manière une agression contre les Nations.

Que se passe-t-il quand la Chine, quand la Russie, quand d’autres puissances, entendent elles aussi appliquer leur droit de manière extraterritoriale ? Quand par exemple, la Russie entend que toutes les données personnelles des Russes utilisées sur Internet soient préservées dans des serveurs installés sur le sol de la Russie, ou bien quand la Chine entend que son système de responsabilité collective, qui rend les membres d’une famille coresponsable des petits délits commis par l’un d’eux, il est difficile de ne pas voir se dessiner des zones de conflit à venir entre des logiques contradictoires et des influences concurrentes. Il est plus difficile encore de ne pas voir à quelles incroyables difficultés est promise la liberté d’expression, quand tout ce qui a été dit peut être reproduit et utilisé contre celui qui l’a dit, des années plus tard et dans un contexte totalement inconnu au moment de la déclaration initiale ! Cette forme de négation de l’histoire, ce négationnisme du temps et de l’oubli peut justifier les formes les plus aigües du repli, du silence, et de la sortie du monde.

La réalité est qu’un droit qui ne procède pas des traditions, de l’histoire et des mœurs reste un droit colonial. Il permet tous les jeux, il autorise tous les faux-semblants. Et il crée des vides juridiques où l’arbitraire, la violence, l’injustice peuvent se lover, là où il prétend faire du droit. Un marché du droit, qui est aussi marché de la puissance, voire de la terreur, s’installe. Et ce n’est certes pas la facilité des affaires qui en sera juge !

3 – Situation exposée de l’Europe

Elle se veut sans frontières, elle s’affirme porteuse de valeurs universelles, elle refuse de définir ses limites et son identité, ce qui signifie qu’elle est «un contenant sans aucun contenu» (selon Ortega Y Gasset, cité par Rémi Brague), donc éminemment conflictuelle, livrée à des mouvements dont elle ne veut pas se défendre faute d’accepter de les nommer, et qu’elle est un facteur de déstabilisation dans le monde des différences revendiquées. Seuls sont facteurs de paix les peuples sûrs de ce qu’ils sont et de ce qu’ils se doivent, capables d’un respect de l’autre fondé sur la séparation et sa limite.

Le cas de l’Europe vis-à-vis de la loi universelle est tout à fait singulier. Singulier, en raison du rôle de l’Union européenne. Singulier, en raison de l’obéissance imposée aux intérêts américains, ou à ce qui s’affirmait comme tel. Singulier en raison de l’imposition de l’idéologie post-nationale, plus avancée et plus totalitaire en Europe que partout ailleurs. A la différence de l’État fédéral américain et surtout des États fédérés, demeurés profondément nationalistes dans leur être, l’Union européenne s’est constituée contre les Nations d’Europe et s’est assimilée à l’agent local de la globalisation; elle sera la dernière à reconnaître l’échec d’une entreprise condamnée, mais dont l’échec signifie sa fin.

Leur hyperpuissance a pu conduire les États-Unis à s’identifier au monde, et leur loi, à la loi universelle. Une phase de décantation a eu lieu, marquée par les échecs, les déceptions, les coûts, phase dont l’aboutissement a été l’élection de Donald Trump en novembre 2016. Les États-Unis ont considéré bien à tort, que l’universalité du droit signifiait l’extension universelle du droit américain, porté par leur hyperpuissance financière et militaire. De sorte que, jusqu’à ces dernières années, jusqu’à la crise de 2007-2008 en tout cas, globalisation signifiait pour eux, comme pour bien d’autres, américanisation du monde.

C’est fini. Après l’expérience du «Grand Moyen Orient », démocratique et libéré de l’emprise de l’Islam, après l’expérience de l’occidentalisation de la Turquie rapprochée de l’Union européenne, après l’expérience de l’irrésistible attraction de l’Ouest sur la périphérie russe et sur la Russie elle-même, sur l’Inde ou sur la Chine, la succession d’échecs et de coûts a convaincu les plus constants soutiens des néoconservateurs; le globalisme qui s’était emparé de Washington ne conduisait qu’à une chose, la guerre mondiale, et à une guerre des civilisations que les États-Unis ne pouvaient gagner, comme Barack Obama lui-même l’avait annoncé en 2016. Même l’hyperpuissance ne peut gagner contre la diversité du monde – ou contre l’Islam. Elle ne peut qu’apprendre à vivre avec.

Les citoyens américains ont tiré les conséquences de ces échecs, du saccage des classes moyennes et du territoire américain qui a été l’effet le plus certain du libre échange naïf des années 1990 et 2000, et peut-être plus encore de la faillite morale, sociale et sécuritaire qu’a entraîné l’idéologie globaliste. L’élection présidentielle de 2016 a été l’élection d’un Président américain, affirmant la préférence nationale et abandonnant toute ambition d’exporter le mode de vie américain.

L’Union européenne sera-t-elle la dernière et la seule, à imposer aux Nations d’Europe un agenda globaliste dont personne ne veut, à part les collaborateurs empressés des nouveaux Empires que sont les GAFA, les milliardaires de la technoscience financiarisée, et des Fondations et ONG qu’ils financent pour poursuivre leurs affaires par d’autres moyens ?

La réalité est que la globalisation ouvre un champ stratégique planétaire où les puissances vont s’affronter pour affirmer leur influence, façonner leur espace stratégique, lutter pour lui donner de la profondeur, et soumettre leurs confins à leur loi.

La réalité est que la globalisation rebat les cartes des affirmations nationales, sans rien changer sur le fond au triomphe de l’État Nation comme forme politique de la modernité. Et la réalité est aussi que ni la dimension d’un territoire, ni sa population, ni même sa richesse ou sa puissance ne déterminent ses chances dans la globalisation, face au marché du droit, comme peuvent le faire son unité interne, son identité et sa préférence pour soi.

Les illusions européennes en matière d’uniformisation mondiale et d’extension planétaire du droit, de la norme, de la règle, etc., deviennent un facteur de vulnérabilité majeur. L’Union ne semble pas percevoir combien son insistance à se mêler de ce qui ne la concerne pas, de ce dont elle n’a pas à s’occuper, est porteuse de conflits dans le futur, tant elle rappelle l’attitude et le principe d’extension des colons dans leur entreprise de colonisation; tout appel à l’aide, toute catastrophe étaient une bonne chose, parce qu’occasion de renforcer sa présence d’abord, son autorité ensuite, enfin son caractère indispensable.

La globalisation a imposé à l’Europe continentale des notions juridiques et des principes légaux qui lui étaient étrangers, et qui parfois sont contraires à ses propres notions et systèmes juridiques.

Parmi les effets inédits du coup d’État du droit, se trouve la nouvelle séparation du monde, qui fait des États-Unis comme de l’Europe les victimes de l’illusion globaliste qu’ils ont nourrie.

Un risque avéré pour les entreprises européennes

Les entreprises américaines ont obtenu que soit appliqué aux entreprises concurrentes, européennes essentiellement, le droit anti-corruption américain.

Elles considèrent jouer à jeu égal. A vrai dire, elles ont même l’avantage de jouer dans leur droit, ce qui équivaut à jouer sur son terrain pour une équipe sportive.

Ce faisant, elles laissent ouverte la question; qu’en est-il des entreprises d’autres pays? Par exemple, d’entreprises dans lesquelles les capitaux publics ne sont pas distincts des capitaux privés, les dirigeants privés des hauts fonctionnaires mandatés par l’Etat, et dans lesquelles ‘intérêt privé n’est pas distinct de l’intérêt national? Qu’en est-il des entreprises qui ne publient pas leurs comptes, ne donnent pas accès aux auditeurs internationaux, et dont les chiffres d’activité, de rentabilité et de productivité sont une boîte noire?

L’extraterritorialité du droit, telle que l’idéologie des Droits individuels la diffuse, telle que la corruption des institutions, des Nations et des mœurs en résulte de manière spectaculaire, telle enfin qu’elle menace la diversité des sociétés humaines au point de devenir le premier risque qui pèse sur la survie de l’humanité, est moins un problème interne à la relation Europe -États-Unis qu’elle n’est un problème externe.

D’abord, parce qu’elle est efficace pour couper les entreprises occidentales du reste du monde.

Ensuite, parce qu’elle constitue objectivement un handicap concurrentiel lourd, notamment dans les secteurs dont les interlocuteurs appartiennent à la fonction publique ou au gouvernement.

Enfin, parce qu’elle ignore les conditions effectives de la concurrence et de l’implantation sur un marché extérieur.

La réalité est que les entreprises européennes et les entreprises américaines ne sont pas dans la même situation par rapport aux sanctions extraterritoriales et à la globalisation du droit. Le marché intérieur, national, n’est pas le même. Les entreprises européennes ont une antériorité considérable dans le reste du monde sur les entreprises américaines, antériorité qui s’accompagne de proximités linguistiques culturelles et juridiques remarquables, notamment dans les pays ayant appartenu aux anciens empires britanniques, français ou espagnols. Les entreprises européennes ont appris très vite comment travailler dans différentes langues, différents cadres juridiques, sociaux et fiscaux. L’Europe n’est pas une union au sens où les États-Unis peuvent l’être. Entre les nations européennes, les différences sanctionnées par tant de guerres, mais aussi mais tant de prodigieuses réalisations culturelles, artistiques et politiques exprimant ces différences, ont été approfondies par l’histoire et constituent un enrichissement manifeste, qui explique notamment l’attraction que les Nations européennes continuent d’exercer, et leur résilience nationale, régionale et locale.

Une conception altérée de l’identité européenne, de l’affirmation politique de l’ensemble constitué par les Nations européennes, a fait dériver une construction politique localisée, circonstanciée et identifiée en aspiration indifférenciée, universaliste et confusionniste, dans laquelle tout ce qui est bon, pacifique et ouvert serait européen, tout ce qui est mauvais, défensif et défini serait étranger à l’Europe ! C’est non seulement définir l’Europe contre ce que les Nations européennes ont toujours été, sourcilleuses quant à leur indépendance, belliqueuses dès qu’elles en sentaient l’intérêt, et parfaitement définies par leur filiation à Jérusalem, à Athènes, à Rome et Byzance, c’est plus encore tourner l’Europe contre les Nations et les peuples d’Europe, la livrer à l’invasion au nom d’un idéal fabriqué et la plonger dans la confusion qui précède la soumission. C’est en ce sens qu’il convient de réagir contre le coup d’État du droit, contre la tentative d’une mainmise du droit sur la politique et sur la volonté des peuples, et de mobiliser rapidement la résistance des peuples européens qui veulent demeurer eux-mêmes sur leurs terres et dans leurs lois, contre la dissolution mondialiste dont le droit, l’État de droit et le totalitarisme des Droits de l’individu sont les moteurs.

Conclusion

Le droit était le moyen de l’ordre, de l’égalité et de la justice qu’une société se donnait à elle-même.

Le droit est devenu l’outil de corruption des sociétés humaines, et d’agression des Empires contre les Nations.

Pour le reconnaître, il faut s’attacher à distinguer la part sans cesse réduite des lois et des règles qui, s’appliquant à tous les domaines de la vie en société et des rapports humains, proviennent du débat démocratique et en font l’objet; la part inversement croissante des textes, des lois et des règles qui échappent à tout contrôle démocratique, ne sont ni débattus ni même identifiés, alors même que certains sont absolument déterminants pour des éléments majeurs des existences individuelles et collectives.


L’exemple de cette dépossession de la démocratie par le droit se trouve dans le domaine monétaire, bancaire et financier. Depuis la révolution libérale, la déréglementation et le décloisonnement des marchés, des activités aussi décisives pour le progrès social, la sécurité économique et la confiance que l’émission de la monnaie, la gestion du crédit et des taux d’intérêt, l’attribution du capital, sont régies par des règles qui échappent à peu près complètement à tout contrôle politique, aussi bien qu’à la gouvernance locale ou régionale.

Ce dessaisissement a pu être présenté comme un progrès. Il a consisté à dresser les peuples contre eux-mêmes, au point qu’ils doutent de leur propre sagesse. Il n’a pu se faire qu’au prix de la démocratie, et qu’au prix de la destruction de ce qui demeurait de l’ordre économique et du droit économique, celui qui subordonne la gestion de ces biens communs éminents que sont la monnaie, l’économie et la finance au bien public, et non aux intérêts privés.

Hervé Juvin (2017). Le coup d’État du droit. De l’extraterritorialité du droit américain à l’offensive globaliste. L’avènement d’un droit universel, menaces et réalités pour les Nations européennes. Un rapport pour la Fondation pour une Europe des Nations et des Libertés (FENL). Paris.

Lire aussi :
1. Le coût d’État du droit, introduction
2. I – De quoi s’agit-il ?
3. II – Tentative de prise de pouvoir en cours

#donaldtrump #globalisation #droitdesaffaires #europe #democratie

UE de Bruxelles contre Europe des nations

UE de Bruxelles contre les nations européennes. La dictature de l’UE de Bruxelles.
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Brussels EU against European nations. The Brussels EU dictatorship. Frexit brexit dexit deutchexit fixit grexit hungrexit irexit italexit nexit oexit polexit swexit

Promesse et réalité de l’UE de Bruxelles

Promesse et réalité de l’UE de Bruxelles. L’UE promise. L’UE aujourd’hui. Frexit brexit dexit deutchexit fixit grexit hungrexit irexit italexit nexit oexit polexit swexit

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The promise of the Brussels EU. The promised EU. The EU today. Frexit brexit dexit deutchexit fixit grexit hungrexit irexit italexit nexit oexit polexit swexit

Après le Brexit…

Pour la première fois, un pays quitte l’Union européenne
Vous voyez que c’est possible ! Alors : changement radical de l’Union européenne ou Frexit ? Chard pour le quotidien Présent

For the first time, a country leaves the European Union. You see that it is possible! So: radical change in the European Union or Frexit? Chard for the Daily Present

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